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samedi 4 avril 2015

Deux adolescentes dans le cabanon de l'aire de jeux au-milieu des pétales de rose et du sang...


Jeunesse désenchantée à Berlin


Stefanie de Velasco      Lait de tigre  (Belfond) traduit de l’allemand par Mathilde Sobottke. 

La suite, c’est quand ? Oui, parce qu’en sortant de ce roman, on a vraiment envie de savoir ce qui va se passer pour Nini, Jameelah, sa meilleure amie depuis toujours, Amir, leur copain, petit frère de Tarik et Jasna...ce qui va se passer pour eux dans 5 ans, 10 ans, 20 ans...
Deux filles, la narratrice, Nini, et Jameelah, l’Irakienne qui rêve de devenir allemande, traversent un été de congés scolaires très particulier.
Deux filles inséparables, assises à la même place en cours malgré la vieille Struck, qui habitent le même quartier depuis toujours, avec son aire de jeux où désormais enfants arabes et bosniaque ne se mélangent pas.
Ces deux filles de 14 ans ont pour horizon prochain leur dépucelage. Avec qui ? Nico, Lukas, Fauteuil Roulant ou Siège auto, ce père de famille qui lève deux ados de 14 ans qui jouent aux putes sur la Kurfurstrasse ? En fait, elles ne jouent pas, elles s’entraînent...
« On se fait dépuceler ! Y’en a marre de s’entraîner »
En attendant, elles se saoûlent en buvant du lait de tigre dans les toilettes du lycée, elles vont à la piscine entre amis, elles traitent les vieux schnocks de nazi pour leur couper la chique, elles regardent vivre les adultes autour d’elles, entre la maman qui ne sort plus de son île-canapé et le grand frère de la famille bosniaque qui va commettre un crime d’honneur...Toute une galerie de personnage bien campés qui ont leur rôle à jouer.
Ça pue les canapés millénaires où s'assoient des adultes qui savent toujours tout mieux que les autres, mais qui ont totalement foiré leur propre vie et sont tellement seuls à présent qu'ils sont obligés de se branler tous les soirs.
Elles prennent le bus, croisent régulièrement deux fous Apollo et Aslagon, sorte de personnage sortis d’une pièce de Beckett.
Et, pour invoquer l’amour, se livrent à des sorcelleries la nuit vers minuit. L’heure du crime....Scène cruciale du roman.
«  Je me sens vraiment stupide, à déambuler dans l’aire de jeux toute nue en lançant des pétales de roses derrière moi. Les pétales, ça passe encore, mais chuchoter le prénom, ça craint vraiment. »
Nico est assis sur son BMX, de la fumée monte au-dessus de sa tête. Il sourit quand il me voit arriver et passe sa main sur son crâne rasé qui brille dans la lueur du lampadaire.
Un roman d’apprentissage qui ressemble à une bédé colorée, des scènes brèves comme un découpage de film. Son charme tient surtout du contraste entre la simplicité d’un style très visuel et les choses graves qui s’y produisent, deux gamines qui rêvent de l’Amour mais savent déjà enfiler une capote en la mettant dans leur bouche...

Je suis peut-être trop vieux pour ce genre de roman. Je crois qu’un adolescent qui a moins lu sera davantage marqué.

L’opération Masse critique de Babelio en partenariat avec les éditeurs est une bonne occasion de découvrir des livres qu’on n’aurait jamais lu sinon, par exemple un « roman de filles » écrit par une auteur allemande au nom espagnol...Merci à eux et aux éditions Belfond.

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