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samedi 13 septembre 2014

La vengeance d'une femme amoureuse

Valérie Trierweiler  Merci pour ce moment  Les Arènes (2014) 


Valérie Trierweiler prend la plume pour apporter sa vérité face aux miroirs déformants - des milliers d'articles, des dizaines de une, une vingtaine de livres- du temps où elle était sur la place publique. Voici son histoire.

Valérie Trierweiler se souvient...Les événements d'il y a moins de 6 mois. Janvier 2014. Closer publie les photos de son compagnon François Hollande, Président de la République Française (2012-20...), casqué, sur son scooter, se rendant chez sa maîtresse, l'actrice Julie Gayet. L'image fait rire la France,Taïwan et le reste du monde, mais pas Valérie.
«- C'est vrai quoi ? Tu couches avec cette fille ? - Oui, avoue-t-il en s'allongeant à demi, appuyé sur son avant-bras.»
Sur le coup elle dit se sentir davantage atteinte par le désastre politique que par sa faillite personnelle. Mais au réveil elle subit le contrecoup, la première dame de France se retrouve à l'hôpital, perfusée, vêtue de la chemise de nuit de l'Assistance publique, sous le contrôle bienveillant du psychiatre Roland Jouvent (auteur de l'essai Le cerveau magicien que je lis un mois plus tard, pour retrouver un peu de crédibilité ).

 Elle parle de sa douleur. Elle se souvient avec émotion des gens qui la soutiennent, Pierre-René Lemas, les gardiens de La Lanterne. Elle a peur de l'inconnu, y compris sur le plan financier, avec trois garçons qu'elle élève seule. Elle a renoncé à la télévision depuis qu'elle est à l'Elysée, ne gardant plus qu'une chronique littéraire dans Paris Match. L'occasion de se souvenir de son goût pour la lecture, les livres de France Loisir que ses parents achetaient...Elle révèle un scoop: ils ont dîné avec Bernard Pivot dans la bibliothèque de l'Elysée. Elle se montre désagréable avec le policier qui lui apporte ses croissants.

Avec François c'est la fin. Elle vide ses affaires, elle se sent répudiée par la dépêche AFP laconique qui annonce la fin de leur vie commune.
Elle continue à se souvenir. Ce qu'elle n'a pas voulu entendre: la rumeur de la liaison, le paparazzi Rostain dans le bureau de Hollande, le mot fariboles utilisé par FH; Et aussi ses erreurs à elle. Elle explique dans quelles circonstances elle décide d'envoyer un tweet de soutien à Olivier Falorni, candidat dissident adversaire de Ségolène Royal dans une circonscription. Elle sait que si Ségolène est élue, elle va vouloir se retrouver au perchoir de l'Assemblée nationale, chose qu'elle ne supporte pas.
Réaction de FH  : Il est muré dans un de ces silences qui me font tant de mal, écrit-elle. Elle lui reconnaît « ...il a cette qualité immense de regarder d'abord devant et de ne jamais s'attarder sur ce qui est fait. »

Elle explique qu'elle l'a aimé quand il était au plus bas dans les sondages, qu'elle a sacrifié beaucoup pour lui, sans retour. Elle a refusé l'utilisation de ses enfants pour avoir une image plus sympathique.

A ce moment de la récapitulation un peu fastidieuse de ce drame bourgeois, de ce soap élyséen, de ce petit fragment de la vie d'un couple en France en 2014, je me demande si je continue. En fait c'est un livre qui monte en force. A la fin, tu pleures. Enfin presque.

Elle plonge encore plus loin dans ses souvenirs. 1988, François Mitterrand lance à la journaliste de 23 ans "on se connaît ? " (en fait je crois qu'elle suggère que Tonton la drague...) Elle est remarquée, elle entre comme pigiste à Paris-Match, Bernard Tapie cherche à la faire virer parce qu'elle a rapporté exactement ses paroles, mais il n'y arrive pas. Elle rencontre son mari Denis Trierweiler. Elle parle de son admiration pour sa mère mais ne veut pas du même destin: 6 ème enfant à 20 ans, père invalide et tyrannique, elle était l'esclave de tout la famille. Bref, dit-elle : « On me prend pour une bourgeoise car je reste souvent en retrait, ce qui me vaut la réputation de froideur et de fille hautaine » Et qu'elle porte des tailleurs. C'est vrai j'avoue, jusqu'ici, j'arrêtais pas de me dire: c'est une bourgeoise. En fait non.

Et puis elle rencontre un certain François Hollande, jeune politique jovial, meneur de bande et très intelligent: « Il va tellement vite dans ses réflexions, la réponse fuse limpide avec une pointe d'esprit...»

Elle raconte assez rapidement sa carrière de journaliste politique, l'amitié avec FH, la naissance de ses trois fils dans les années 90. En 2000, elle a une première scène avec Ségolène Royal alors qu'elle n'est qu'amie avec FH « ...son instinct flairait un danger que moi-même je ne sentais pas. » Elle pleure à la déroute de 2002, la réaction de FH " devant le tragique de la situation, il opte pour l'humour". Ils deviennent de plus en plus complice, elle explique que la rumeur et la jalousie de Ségolène Royal précèdent leur histoire.

Retour en 2014 : Ségolène Royal, nommée Ministre de l'environnement, le même poste qu'en 1992, et qui, à l'époque, accouche presque devant les caméras de TF1. A Paris-match, Valérie Trierweiler se fait engueuler parce qu'elle rate le scoop, elle-même enceinte de son premier fils...

Puis c'est le baiser de Limoges qui les prend par surprise tous les deux, le 14 avril 2005, leur anniversaire...Ségolène, très jalouse, se présente à la primaire socialiste, elle devient la candidate, elle perd, puis c'est la traversée du désert de François Hollande qu'elle considère comme les plus belles années de leur relation. Voyage en Grèce sur des scooters de location, elle l'accompagne pendant le décès de sa mère....
Elle apprend les vraies valeurs de la vie à cet homme qui
« ...préfère se passer d'un repas lorsque ce n'est pas du premier choix, ne mange pas mes fraises si elles ne sont pas des "guarriguettes", ne goûte pas aux pommes de terre si elles ne proviennent de Noirmoutier, et met directement à la poubelle la viande si elle est sous vide. Il connaît si peu le prix des choses. Combien de fois l'ai-je entendu dire "ce n'est pas cher" pour des aliments ou des objets hors de prix ! » 
Voilà, j'avais mis un signet à ce passage parce qu'il m'a choqué. Et je me suis demandé : en racontant ça, elle essayerait pas de venger, un peu ? En même temps, on le savait que c'était des bourges...
Le livre continue à se dérouler par vagues. Il y a les vagues de la douleur, de la jalousie et de la vengeance où elle distille les gouttes de venin, c'est répétitif mais très dilué dans le corps du texte. La duplicité du Président est le thème qui revient le plus souvent. L'homme qu'elle côtoie devient quelqu'un d'autre au sommet de l'Etat. Il ne fait pas attention à elle, il ne connaît même pas le nom de son émission de télé.

Il y a les vagues du passé récent, toutes ces rencontres qu'elle a fait en étant première dame et qui lui permettent de se valoriser. Notamment quand elle évoque Michelle Obama, charismatique, qui a sacrifié sa carrière d'avocate à l'ambition de son mari, et peut montrer un œil noir de jalousie quand celui-ci fait un selfie avec la première ministre danoise aux obsèques de Mandela. Et surtout l'humanitaire, les actions qui lui laissent les meilleurs  souvenirs, accompagner des enfants une journée sur une plage, son engagement pour le RDC, la situation épouvantable au Congo.
Il y a les vagues du présent, elle ne cesse de dire que FH l'inonde de textos, tous les jours, la pressant de lui pardonner. Elle raconte qu'elle hésite, elle pourrait se laisser tenter, mais elle n'y croît plus. Et là, le lecteur pense , et si Julie sait ça et qu'elle aussi reçoit des textos...Peut-être même que c'est fait exprès ?
Vendu et piraté....

Ce que j'en pense. Ouh la la. J'en pense rien. Je ne mêle pas des affaires des autres. D'ailleurs, j'ai à peine survolé ce livre...
Bon je me lance:  humiliée dans des circonstances exceptionnelles, à la face du monde, on ne peut pas nier à Valérie Trierweiler le droit d'écrire un livre, dire sa vérité et le publier pour emmerder le monde. Après tout ce n'est qu'un livre, ce ne sont que des mots. Et si elle avait attendu 2017, elle n'aurait rencontré que l'indifférence. Ce genre d'histoire se périme vite. Mais le lecteur peut ne pas être dupe, quand on la lit, on est en empathie, puis ça décante et on fait la part des choses. On est pas obligé de choisir un camps. Juste savoir. Ah, Mr Hollande, quand j'ai voté pour vous, j'imaginais pas que vous alliez vous faire gauler par des paparazzis sur votre scooter...Il est malheureusement là, le moment où la sphère privé/public bascule...
 Je conseille ce que j'ai lu de plus intelligent sur le sujet:  l'article ou le billet de Caroline Eliacheff . Et celui de Pierre Haski sur Rue 89.


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