Pages

samedi 15 mars 2014

Lecture d'Illusions perdues 4, la Corruption

Journal d'un lecteur
Illusions perdues, d'Honoré de Balzac
NB: ce billet dévoile des éléments de l'histoire.
kindle: de 38 % à 45 %.
...le temple de la prostitution. Une femme pouvait y venir, en sortir accompagnée de sa proie, et l’emmener où bon lui semblait. Ces femmes attiraient donc le soir aux Galeries-de-Bois une foule si considérable qu’on y marchait au pas, comme à la procession ou au bal masqué.

Voici venue l'heure sombre de la corruption. D'abord, la visite à l'éditeur Dauriat surnommé le "ministre de la littérature". Sa boutique est nichée dans la Galerie des Bois, ce bazar ignoble où sévit la prostitution et où on se marche sur les pieds. Les cabinets de lecture n'existaient pas, il fallait acheter un livre pour le lire. Aujourd'hui, on remplacerait "cabinet de lecture" par bibliothèque ou médiathèque.
Lucien se trouve là comme un embryon. Il voit un auteur admiré se prosterner devant un journaliste car ce sont eux qui font le succès d'un ouvrage, l'éditeur doit payer pour obtenir les articles. S'il s'en étonne, on lui répond:  
  « Aujourd'hui, pour réussir, il est nécessaire d'avoir des relations (...) Ce qu'il y a de plus dangereux est d'avoir de l'esprit tout seul dans son coin. » 
Réseau, réseau, réseau ! Déjà à l'époque !
Les journalistes sont les rois, ils entrent comme ils veulent dans un théâtre bondé, ils ont accès à la loge du directeur. Les actrices Florine et Coralie sont entretenues par des négociants millionnaires ennuyés de leur mariage. Florine est  l'amoureuse de Lousteau, qui s'accommode de la situation :
« C'est comme si vous aimiez une femme mariée ».
 Florine la "maigre", 16 ans, a déjà fait débourser 100 000 francs à Matifat, le droguiste, un "coffre-fort donné par l'amour" qui régale les jeunes journalistes.
La beauté de Lucien, l'Apollon du Belvédère, figure de Girodet, fera tourner la tête à Coralie qui en oublie son texte.
Mais en voilà un que je ne connais pas ? dit Florine en avisant Lucien. Qui de vous a ramené de Florence l’Apollon du Belvédère ? Monsieur est gentil comme une figure de Girodet.

 Lucien voyage d'étonnements en étonnements. Depuis qu'il entré dans la vie littéraire, il constate que tout se résout avec de l'argent. Même le succès d'une pièce. Si les 3 théâtres voisins montent une cabale, on surpaye les claqueurs pour que leurs sifflets ne soient pas trop fort.

Lucien le poète aperçoit l'envers des consciences, le jeu des rouages, il repense au système de pauvreté soumise du Cénacle, il voudrait résister. Alors Lousteau lui rétorque:
« Vous barbotez dans des scrupules de religieuse qui s'accuse d'avoir mangé son oeuf avec concupiscence. »
Il le presse d'étouffer ses scrupules:
« Vous êtes à la veille de devenir un des 100 personnages privilégiés qui imposent des opinions à la France. »
Et puis il y a Coralie, le type de filles qui exercent à volonté la fascination sur les hommes. Bref, Lucien respire l'air de la volupté, un narcotique, une peste qui dévore l'âme. Et puis Balzac annonce déjà le destin de Coralie qu'il compare à une actrice réelle: Mlle Fleuriet, morte à 19 ans.

Voilà, on est dans le vif du sujet, l'universel: l'argent, l'amour, le sexe et le pouvoir. Étonnant, la mémoire, je me souvenais des émotions suffocantes à la lecture mais je redécouvre les épisodes du roman dont je n'avais gardé aucun souvenir.

1 commentaire: